Musiques-Échanges serait très heureuse de vous compter parmi ses membres.

Depuis sa création en 1993 l’association participe aux grandes manifestations estivales de la ville d’Aix-en-Provence et de la Région Sud en proposant une série de concerts de grande qualité dans le cadre de son FESTIVAL INTERNATIONAL LES NUITS PIANISTIQUES.

Le Festival International œuvre tout au long de l’année en proposant des concerts dans la région et au-delà, dans des salles de concert, des écoles et des hôpitaux. Il suscite des rencontres intergénérationnelles autour de la musique et offre une tribune aux jeunes talents.

L’Académie Internationale, organisée par l’association parallèlement à son Festival, offre aux professionnels et amateurs de tous âges une formation musicale sérieuse en invitant des professeurs confirmés du monde entier.

Si vous voulez nous rejoindre et/ou offrir cette adhésion à un proche, nous vous invitons à télécharger et à remplir le bulletin d’adhésion.

Pour plus d’informations vous pouvez nous adresser vos éventuelles questions.

Si vous êtes déjà membre, nous vous remercions de votre fidélité et nous vous prions de bien vouloir renouveler votre adhésion pour l’année à venir.

Le piano, instrument solitaire ou de solitaire, permet également de faire de nombreuses combinaisons amicales, confraternelles, collégiales. C’est dans cette dimension, profondément humaniste, que s’inscrit le concert offert par l’association Arpegionne, dans la grande salle de l’école de musique éponyme, nichée au cœur d’un quartier marseillais, fondée et portée depuis vingt-deux ans par la dynamique Isabelle Gueit. Il vient clôturer, puissamment, la saison des Concerts d’Arpegionne.

En la personne du pianiste Michel Bourdoncle, fondateur des Nuits pianistiques d’Aix-en-Provence, c’est donc une association, Musiques-Échanges, qui rencontre une autre association, en la personne du pianiste Philippe Gueit, interprète, professeur, musicologue et homme de média. Rappelons que c’est le même Philippe Gueit qui a présenté le concert de Michel Bourdoncle, donné le cinq mai dernier, à l’auditorium Campra du conservatoire Darius Milhaud d’Aix-en-Provence. Dans une complicité palpable avec l’artiste, il avait su souligner la portée symbolique et artistique des œuvres programmées. Elles synthétisaient les œuvres-phares du pianiste, qui, depuis quarante ans sillonne les continents et se produit dans les plus grandes salles de concert, en Europe, en Asie ou encore dans les Amériques.

Ici, c’est « l’âme slave », dénominateur commun et mystérieux des pays de l’Est, qui constitue le fil rouge de la programmation. Deux pianos, emboîtés en vis-à-vis, viennent faire vibrer l’acoustique délicate de la pièce, rendue feutrée par l’incroyable discothèque et vidéothèque qui en tapisse les murs.

Le concert s’ouvre par une rengaine nostalgique, une pièce rendue célébrissime par la publicité, La Valse n° 2 de Dimitri Chostakovitch, op. 99a, transcrite pour deux pianos.

De l’Est résonne ensuite l’intense Sonate n° 7 en si bémol majeur opus 83 de Prokofiev, dite « de guerre », tendue, acide, nerveuse, aux répétitions rythmiques syncopées, dont le final martelé, à jouer precipitato mais toujours avec humanisme, préfigures urgences et crises de notre temps, sur fond de guerre en Ukraine. Solidité et délitement, enfermement et liberté, ordre et chaos, pizzicati et amples résonnances, coups de griffes et legato admirable oscillent sans cesse sous les doigts de Michel Bourdoncle, formé au Conservatoire Tchaïkovski de Moscou. L’intrication sonore, inexorable, l’insistance du son à sans cesse se déplacer de manière syncopée, voilà la modernité fondamentale de cette œuvre, apothéose d’un monde au bord de l’abîme. Le toucher de Michel Bourdoncle est ferme et moelleux, à l’abri du pianisme et de la digitalité ; il travaille les polyphonies en stratifiant de manière précise et imaginative les couleurs et les dynamiques.

Philippe Gueit se met alors au piano et offre le charme d’un recueil de pièces, cinq préludes op.40, écrites par un compositeur ukrainien de la nostalgie et de la réminiscence, injustement oublié : Serge Bortkiewicz (1873-1952). Le post-romantisme est délicieux sous les doigts de Philippe Gueit, qui fait vibrer l’air de la salle de son harmonie capiteuse, devenue salon de musique d’une aristocratie mécène et mélomane. La musique se souvient des fastes anciens, ainsi que de la musique pour piano de compositeurs français tels que Fauré, Duparc, ou encore du Poulenc des Improvisations (Hommage à Édith Piaf notamment).

La suite pour deux pianos, op.17 de Rachmaninoff réunit enfin les deux pianistes. Le premier mouvement déploie son énergie industrielle, ou bien le vent qui souffle dans les grands déserts russes. Le deuxième s’enroule autour de serpentins, de demi-tons obsessifs, propres à une valse sans langoureux vertige. Ce dernier survient lors du lyrique troisième mouvement, Romance, qui semble faire monter son chant vers l’extase. Dans le dernier mouvement, Tarantelle (sic), un ample thème parvient à se dégager du fourmillement ternaire de petites notes, tandis que le compositeur dépose d’autres repères clarificateurs : répétitions, contrastes, modulations… Cette poétique pianistique est respectée, célébrée par les deux interprètes dont l’écoute réciproque peut se passer de regard.

Un rappel, demandé par le public, est, printemps oblige, la célèbre Valse des fleurs de Tchaïkovski, transcrite pour deux pianos par Zoltàn Koksis, avec ses arômes d’orchestre et ses voletés délicieux.

Le concert, commenté par Isabelle et Philippe Gueit, s’achève par un verre de l’amitié, en présence des artistes, d’un public fidèle et des élèves de l’école, accompagnés de leurs parents.

Florence Lethurgez, musicologue

L’auditorium Campra du conservatoire Darius Milhaud d’Aix-en-Provence fait salle comble ce premier vendredi du mois de mai, le public étant venu nombreux assister à un récital d’exception. Il est donné par le pianiste français Michel Bourdoncle, concertiste, professeur et directeur artistique du Festival-Académie des Nuits pianistiques d’Aix-en-Provence. L’auditoire est également diversifié, mêlant les âges et les profils : élèves, parents, mélomanes habitués ou non du festival, public en provenance de l’étranger venu en groupe…

Un musicologue, lui-même pianiste, Philippe Gueit, vient présenter le concert et préciser son originalité. Il s’agit d’un concert anniversaire dont la programmation retrace les étapes les plus importantes d’un parcours musical de quarante ans, pour ce qui est de la scène, de trente-cinq ans pour l’enseignement, et de trente et un ans enfin, pour la direction artistique d’un événement tel que Les Nuits pianistiques d’Aix-en-Provence. Philippe Gueit extrait ensuite le fil directeur de la programmation, qui, au-delà des questions de virtuosité et d’expression, de formes et de couleurs, montre l’attachement profond du musicien au voyage. Ce cheminement à travers les œuvres, comme à travers les territoires, à échelle universelle, qu’il s’agisse de l’Europe, de l’Asie ou des Amériques, fait de Michel Bourdoncle un pianiste de stature internationale, qui pourtant, confiera Philippe Gueit, s’efface derrière la musique, qu’il sert avec passion, engagement et générosité. La dimension transocéanique qui s’offre à entendre derrière les œuvres – d’un anonyme chinois jusqu’à Gershwin en passant par Prokofiev – constitue un enjeu fort de notre époque, qui voit la guerre revenir en Europe ainsi que les équilibres entre les continents se transformer.

Le jeu de Michel Bourdoncle est fondamentalement respectueux du texte, dont il cherche à extraire l’essence émotionnelle. Engagement des épaules, rondeurs des bras, souplesse digitale permettent à deux Intermezzi de l’opus 118 de Brahms d’ouvrir avec une douce puissance l’espace acoustique. Une pièce de Déodat de Séverac, Les muletiers devant le christ de Livia, devient sous ses doigts l’assemblage subtile du profane et du sacré, dont le chant ne fait plus qu’un. Même unité dans La Vallée d’Obermann de Liszt, lente apothéose subtilement dosée, par un interprète maitre des dynamiques, jusqu’à l’extase. Une libération des énergies survient avec la version pour piano seul de La Rhapsodie in blue de Gershwin. Et c’est par une intelligence de la sonorité du piano et du rôle qu’y joue la pédale, dans la transparence ou l’opacité, que Michel Bourdoncle parvient à traverser les mondes, jusqu’aux deux Préludes Brouillards, Bruyères (Livre 2) de Debussy. Le goût de ce dernier, passionné par l’Asie, ses modes et ses sonorités de Gamelan, se retrouve dans la pièce d’un Anonyme chinois, Yan quan san die. Michel Bourdoncle joue très régulièrement en Chine, et peut, de l’intérieur, restituer le syncrétisme entre orient et occident tel qu’il existe musicalement. De l’Est résonne enfin l’intense Sonate n° 7 en si bémol majeur opus 83 de Prokofiev, dont le final martelé, mais toujours avec humanisme, préfigure les urgences et crises de notre temps.

À ce concert original correspond un dispositif de communication original, sous la forme d’un « bord de scène » autour de l’artiste, présenté par Philippe Gueit, conçu et animé par deux membres de l’association Musiques Échanges, dont Anne-Marie Ortiz, membre bienfaiteur de l’association, chargée de sa communication. Quelques questions sur le parcours du musicien, ses origines, ses activités et ses projets, proviennent des protagonistes scéniques. Le pianiste y répond en rendant avant tout hommage à ce que les autres lui ont apporté, de ses premiers enseignants aux grands modèles et amis, en prenant tout d’abord le soin de remercier ses parents. Mais les questions les plus pertinentes et exigeantes viennent de la salle elle-même, le public étant curieux de savoir par exemple ce qu’il se passe dans la tête d’un interprète pendant l’exécution. Le « bord de scène » prend alors les contours d’une véritable Master Classe, tandis que tel élève interroge Michel Bourdoncle sur l’évolution de son interprétation de la sonate de Prokofiev, et que telle autre, d’origine Russe, lui demande quelle œuvre serait représentative des circonstances critiques de notre époque. Chaque réponse de l’artiste est ponctuée par des applaudissements, tandis que la soirée, aussi flamboyante qu’intimiste, s’achève aux alentours de minuit, après une heure de musiques-échanges entre la scène, la salle et peut-être même les coulisses.

 

Florence Lethurgez, musicologue