Journal du Festival IV : Chopin grand architecte
La seconde semaine du Festival se recentre sur ses missions premières ainsi que sur la dimension pleinement architecturale du piano. Au programme, les deux concertos de Chopin, avec, au gouvernail, le chef américano-polonais Marius Smolij, et aux manettes poétiques et puissantes du grand instrument noir, les deux jeunes solistes Jan Jakub Zieliński (Concerto n ° 2 op. 21 en fa mineur) et Seonghyeon Leem (Concerto n ° 1 op. 11 en mi mineur). Mission première ? Réunir les territoires, les horizons et les inspirations : une phalange locale (l’ensemble Giocoso, constitué d’une quinzaine de cordes pour l’occasion et résidant à Rousset), un chef international et deux jeunes talents, formés en France et en Europe.
Il est tentant de comparer et unifier les deux opus concertants du maître polonais : un premier mouvement classique, un deuxième poétique, un troisième chorégraphique. Pourtant, les deux interprètes, conviés en direct vis-à-vis par la programmation exploratoire du Festival, distillent leur relation propre aux différentes facettes déployées dans l’écriture savante, classique et romantique, des deux œuvres.
Une même capacité les réunit, celle de savoir projeter au sein même de leur jeu l’orchestre intérieur et idéal qu’ils se font de leur partition, tout en lançant dans le grand bain des cordes, ses grandes carrures ou ses cantilènes infinies. Une fluidité lyrique, portée par la sérénité de l’un, la ténacité de l’autre, émane de la table d’harmonie. Un pianisme, poétique ou décidé, absorbe et soutient dans ses résonances, le ruban des cordes tissé en temps réel par un Marius Smolij, aux gestes attentifs, précis et rassurants.
Florence Lethurgez