Soirée musicale Mercredi 27 juillet à l’auditorium Campra
Mercredi 27 juillet : 20h30 à l’auditorium Campra
Soirée de musique de chambre
Mozart, Quintette pour piano et vents en mi bémol majeur K452
Poulenc, Sextuor
Jean Marc Boissière : flûte
Valentin Favre : clarinette
Guillaume Deshayes : hautbois
Yannick Maillet : cor
Frédéric Baron : basson
Christine Généraux : piano
Entracte
Récital de guitare, Emmanuel Rossfelder
Tarrega, Introduction, Thème et variations sur le carnaval de Venise, Caprice Arabe
Barrios Mangoré, Valse opus 8 n°4, Un sueño en la floresta
Mertz, Fantaisie Hongroise, Élégie
Paganini,La campanella
Emmanuel Rossfelder : guitare
Le deuxième concert des Nuits Pianistiques est placé sous le signe de la délicatesse, dans le jeu, dans le timbre comme dans l’inspiration.
La première partie du programme réunit, autour du grand piano Steinway, auréolé par un jeu savant de projecteurs, depuis la couleur de miel jusqu’au rouge écarlate, en passant par la douceur froide du mauve, un ensemble à vent, quintette dans Mozart, septuor dans Poulenc.
Dans le premier opus, le Mozart du Quintette pour piano et vents en mi bémol majeur K452, le jeu perlé du piano commande le déplacement velouté des vents, à la faveur d’un souffle clair qui rafraichit la nuit d’été provençale.
Les interprètes, rompus au jeu soliste et chambriste, restituent l’agencement cohérent des cellules musicales, qui chez Mozart, empruntent leur pétillance à l’opéra, leur tricotage au piano concertant. Le raffinement des lignes thématiques est servi par un alliage de timbre, nimbé de diverses résonnances. Hautbois et clarinette échangent leurs diaphonies avec le basson et le cor, sous l’aile bienveillante du piano. Le cor est impérial, tandis que le basson s’ourle de nacre.
Le sextuor de Poulenc apporte son énergie singulière à l’ensemble, qui intègre avec bonheur la flûte traversière. Le piano s’impose dans cet univers qui fait de chaque instrumentiste un protagoniste actif à part entière. Ruptures et continuités sont soulignées, à la ligne claire, comme la musique néo-classique aime à le faire. Les différentes textures se déploient, autour d’un élément récurrent, tel que le trille, la gamme, l’arpège, célébrant, après Mozart, les constituants fondamentaux de la musique tonale, pourtant malmenés chez Poulenc par de grinçantes ou doucereuses harmonies. Comme avec Mozart, la référence de Poulenc est le spectacle total, l’opéra pour l’un, le film hollywoodien pour l’autre.
Après l’entracte, la soirée prend une tournure plus intime, avec un récital dans le récital. Le guitariste Emmanuel Rossfelder se tient à l’avant-scène, au sein de la courbe bienveillante du piano, auquel il rend un très bel hommage. Les cordes, magiquement grattées dans la chair du son, effleurées dans le surgissement des harmoniques, étincellent. L’instrument est sonore, comme un orchestre miniature (Berlioz), tandis que le soliste y essaye tout un éventail de modes de jeu, qui du baroque au romantisme, n’ont rien à envier aux expérimentations organologiques (science du jeu instrumental, « organon » signifiant « instrument ») de la musique contemporaine d’avant-garde.
L’interprète accomplit, en maître de la scène, un véritable stand up, présentant et commentant avec humour le programme des œuvres retenues. Anecdotes savoureuses voisinent avec des remarques concrètes sur les circonstances de leur interprétation, dans l’auditorium Campra, pour le plus grand plaisir d’un public conquis, notamment sur les petites misères climatiques du guitariste – ce dernier souffrant de la température trop froide de la salle climatisée. Très sensible au lieu et à l’esprit qui y souffle, Emmanuel Rossfelder souligne les liens, à la fois dans son jeu et dans ses paroles, entre la guitare et le piano, alors qu’il réfère deux valses de Barrios Mangoré, ou encore La Campanella de Paganini, à l’écriture pianistique, intime ou spectaculaire, de Chopin ou de Liszt. L’écoute comme méditation intérieure ou captation du spectaculaire est ainsi tour à tour mobilisée, à la faveur d’un récital joué et ressenti comme « à fleur de peau », celle de la pulpe des doigts virtuoses d’Emmanuel Rossfelder.
Florence Lethurgez
Musicologue