Concerts de clôture des Nuits pianistiques à Musique dans la rue : vocalité et internationalité
Les mélodies de Chopin, chansons polonaises, écrites entre 1827 et 1847, pour soprano, sont des petits bijoux, trouvés, retrouvés, assemblés pour l’édition de manière posthume, peu connus en France. Or, ils sont déjà pénétrés par cette vocalité que le compositeur polonais confiera au piano, au cœur de ses pages les plus expressives et consolatrices. Le chant de ce recueil – une petite vingtaine de pièces sur des textes poétiques et évocateurs – est celui de la terre natale, du féminin. Cette racine forte parcours l’instrument de la chanteuse polonaise, qui imprègne l’air de la nuit d’été de son timbre de mirabelle, sa prosodie rigoureuse et son engagement émotionnel. Au piano, Michel Bourdoncle, donne l’impulsion, la matière et la couleur, propre au grand tapis pianistique, à l’affût des moindres soupirs et inflexions de la voix humaine.
La soirée s’achève par le récital du pianiste espagnol Leo de Maria, qui, par l’enseignement reçu de son père, Leonel Morales, s’inscrit dans la lignée des grands pianistes cubains. Deux lignes fortes du Festival Les Nuits pianistiques sont ainsi réunies pour cette soirée de clôture : jeunesse et internationalité. La sonate en mi bémol majeur de Mozart sonne avec une délicate ampleur sous les pulpes du pianiste, prolongée par l’Impromptu no 2 en fa dièse majeur opus 36 de Chopin, tout en retenue et intériorité, joué comme à fleur de doigts. Une pièce du compositeur espagnol Granados, El amor y la muerte, balada (extrait des Goyescas, livre II) ajoute sa palette sombre, austère et méditative, ce romantisme noir et mystique propre à l’art espagnol. La Sonate pour piano no 8 en si bémol majeur op. 84 de Prokofiev, l’avant-dernière sonate de guerre (écrites entre 1939 et 1944), fait appel au toucher d’alchimiste du pianiste, à même d’extraire la pureté du chaos, la sérénité du tourment, l’unité de l’éclatement. Un final donné en bis, apporte sa fougue après la fureur : La Valse de Ravel, laboratoire et apothéose pianistique du poème symphonique à venir ! Quoi de mieux pour clore Musique dans la rue selon Les Nuits pianistiques !
Florence Lethurgez